mercredi 5 novembre 2014

Félix de Saint-Hilaire, 10 ans, bluesman.


En août dernier au Canada, une vidéo fit un buzz énorme. On y voyait un enfant de 10 ans, Félix de Saint-Hilaire, non-voyant, chanter un blues en s'accompagnant à la guitare, dans la pure tradition de certains bluesmans des années 30. De quoi bluffer professionnels et connaisseurs avertis du genre (1).

(1) D'autant que la façon de jouer adoptée par Félix semblait a priori peu pratique : guitare à plat sur les genoux (lap steel guitar), une position théoriquement réservée au jeu avec bootleneck.

Postée le 2 août sur Facebook par son moniteur de vacances Steve Joseph, la vidéo atteint 20 000 partages en deux jours.

Le 5 août, alors qu'on en est à 55 000 partages Facebook, la vidéo est mise en ligne sur Youtube par la Fondation des Aveugles du Québec qui avait organisé le camp de vacances :


Le même jour l'agence québecquoise QMI consacre une dépêche à Félix. Aveugle de naissance, il s'est vu offrir une guitare à l'âge de 6 ans. Il a appris en autodidacte, à l'écoute de vieux enregistrements de blues, ayant eu le choc de cette musique.

Le 9 août, Félix est invité à jouer sur la scène du FestiBlues 2014 International de Montréal :


12 août : la chaîne canadienne CTV News Channel consacre un sujet à Félix et au buzz de sa vidéo au camp de vacances (on en est à 90 000 partages Facebook).

13 août : huffingtonpost.ca et dailymail.co.uk rendent compte du phénomène (120 000 partages Facebook).

Le 28 août, Félix est programmé sur ICI Radio-Canada Télé, dans l'émission de Penelope McQuade, pour une prestation mémorable, accompagné par les musiciens-maison de l'émission qui avaient flashé sur sa vidéo.

Felix 01



Sans titre 02

Felix de Saint-Hilaire avait déjà attiré l'attention d'une chaîne de télévision québecquoise quelques mois plus tôt. C'est un buzz sur internet qui l'aura finalement propulsé : il put alors, pour la première fois peut-être, se produire dans des conditions professionnelles. Sa version de Every Day I Have the Blues du 28 août restera dans les mémoires. Deux versions de ce standart du blues s'imposent à mon sens désormais avec le même genre de limpidité : la sienne du 28 août, et celle gravée en 1963 lors de sa dernière cession d'enregistrement par Elmore James (disciple de Robert Johnson, une des influences de Félix).

On attend des nouvelles de Félix (vidéos ou autres) en espérant qu'il se retrouve le plus souvent possible au contact d'autres bons musiciens!

BONUS : il existe un 2ème blues enregistré par Félix en pijama au camp de vacances.

***

Autres vidéos de Félix :
Steve Joseph apprend à Félix le succès de sa vidéo via Facebook (4 août 2014)
Félix joue du bootleneck (août 2013)
Blues (janvier 2012)
Blues (septembre 2011)
1ère vidéo visible en ligne de Félix, 7 ans, sur sa première guitare (août 2011)

dimanche 16 mars 2014

Jean-Marc Leone, artiste peintre : « l'art est un véhicule du vivant »


Jean-Marc Leone


Allant visiter il y a quelque temps une petite exposition de peinture nichée à Herblay (95), d’un peintre apparemment inconnu, je ne m’attendais pas à grand-chose comme souvent dans ces cas-là. Or dès les premiers coups d’œil sur les œuvres exposées, je fus frappé par quelque chose qui émanait des tableaux, et aussi par une unité d’ensemble, bref par un « niveau artistique » que je détectai aussitôt comme haut placé. Jamais à vrai dire je n’avais eu telle impression en découvrant, dans une exposition de hasard, les œuvres d’un artiste. Le peintre, Jean-Marc Leone, était présent : je lui posai quelques questions. Étonné par le fossé entre la qualité des oeuvres et l’apparente absence de réputation du peintre, j’eus l’idée de mettre en ligne une petite interview, qui s’est faite par échange de mails, question après question (1).

(1) La même impulsion m’avait fait mettre en ligne un billet sur mon restaurant fétiche à Paris, scandaleusement méconnu par rapport à d’autres de qualité inférieure mais très attentifs à leur marketing.



1. Il se dégage de vos peintures quelque chose comme une sérénité, un calme, une grande harmonie : est-ce un but recherché ?

Jean-Marc Leone : Oui je cherche avant tout l’unité dans un tableau, qu’il se dégage de lui un sentiment de plénitude, dans le sens qu’il se suffit à lui-même, que cela soit par la forme, par ses couleurs, ou sa structure. Il est important pour moi qu’un tableau me fasse avant tout du bien, qu’il soit source de voyage et de rêve. Je suis heureux que vous ayez senti cela à travers cette exposition, car c’est en soi le but recherché, même si chaque tableau est autonome par son motif, ou son sujet, j’aime construire une exposition comme formant un tout, permettant au spectateur de ressentir le tout comme une seule entité.


2. Attendez-vous d’être dans un certain état intérieur pour vous mettre à peindre ?

Jean-Marc Leone : Non ! Je ne cherche aucun état particulier, bien au contraire juste l’état du plaisir, et de la simplicité, pour se dégager de toute attente volontariste, afin de se laisser conduire par le sentiment du moment. Il est d’ailleurs très jouissif de voir quelquefois un tableau se faire de lui-même, ce sont des moments très précieux, et cela relativise grandement notre action personnelle. L’art nous donne de temps en temps l’accès à un sentiment plus vaste. Il n’est pas rare d’ailleurs de rencontrer ce genre de ressenti dans d’autres formes artistiques. En musique on peut aussi rencontrer ce sentiment similaire, on se sent tout simplement porté par la phrase musicale, il faut juste - et ce n’est pas si simple - se laisser faire… Ce qui n’exclut pas, bien au contraire, d’avoir au préalable construit une idée bien précise, de ce que l’on veut peindre ou jouer.

Pour répondre complètement à votre question, il m’arrive de ressentir le besoin de peindre, sans parler vraiment d’urgence mais une vive envie de faire, de créer, que cela se fasse, alors je laisse tomber toute autre activité, et je me mets à travailler, jusqu’à que ce désir soit satisfait. Le tableau est fait, et me laisse tranquille. C’est aussi très agréable de ressentir cet état presque d’urgence, on se sent appelé par le tableau, il veut sortir, alors je lui donne tout le temps nécessaire pour ce drôle d’accouchement, parfois lent et douloureux, d’autres fois rapide et joyeux. Rien n’est jamais identique, ce qui fait la richesse de ce travail. S’installe alors un dialogue à deux le tableau et moi, et c’est lui qui mène la danse.


3. Vous vous laissez apparemment guider par un «  instinct » ou une sensibilité déjà expérimentés ou affinés dans votre travail de musicien, vous dites aussi que le tableau parfois « se fait de lui-même ». Pourtant il se dégage indubitablement quelques chose de vos tableaux, et que l’on peut retrouver d’un tableau à l’autre (« sérénité et harmonie » pour résumer), comme si chaque tableau était « imprégné » de quelque chose que le spectateur pourrait ensuite « capter ». Êtes-vous conscient d’un tel phénomène ? Ces « harmonie et sérénité » viennent-elles de vous, ou peut-être n’êtes-vous qu’un « transmetteur » de « quelque chose » que vous auriez, peut-être à votre insu (car vous dites ne pas rechercher d’état intérieur spécifique pour peindre), capté ou canalisé ?

Jean-Marc Leone : Il est difficile de dire que cela vient de notre état intérieur, pour ma part je ne suis ni serein ni harmonieux, par contre dire que je le recherche, et que j’essaye par mon quotidien d’être humain, d’y tendre, oui cela j’y souscris, et ce désir profond peut effectivement se faire ressentir dans ces peintures. Il est évident que l’on ne peut pas peindre ce qui ne vient pas de soi, mais on peut peindre un désir, une envie, sans forcément encore l’incarner en tant qu’homme. Je crois que la peinture a sa propre musique, il m’est impossible d’écouter ou de jouer une musique qui ne soit pas reliée à l’harmonie, à une structure qui permet à l’auditeur ou au spectateur de ressentir en lui une détente profonde. J’aime croire que la peinture ou la musique nous aide à nous ouvrir à plus vaste, sans parler de transcendance, mais juste à ouvrir ce qui ne nous était pas accessible auparavant, à nous rendre tout simplement plus sensible à notre humanité. Un art humain, l’homme a un cœur immense, mais malheureusement souvent bien fermé. Je ne peins que ce que je veux voir, j’aime à croire que la peinture nous ramène à notre profondeur intrinsèque ; qu’elle nous procure pour un bref instant une intemporalité. Toute personne est unique, il a son propre ADN, et pourtant, il est évident qu’un phénomène est à l’œuvre, l’homme tend à l’harmonie, c’est une nécessité. Il ne s’y prend pas toujours de la meilleure manière qui soit, mais dans sa profondeur, il y est appelé. Une forme artistique dirigée dans ce sens fait résonner en chacun de nous ce besoin d’être en paix.


4. À votre exposition vous m’aviez expliqué être musicien (violoncelliste), et vous être mis à la peinture relativement récemment (ce qui m’a étonné vu l’impression d’aboutissement et de maîtrise, et aussi de grande cohérence, qui se dégage de vos œuvres). Mais à l’école maternelle au moins vous aviez déjà pratiqué la peinture : avez-vous parfois dessiné ou peint entre temps ? Comment s’est fait, qu’est-ce qui a déterminé le passage à une activité régulière de peintre ?

Jean-Marc Leone : Depuis tout petit, il y a eu un appétit pour diverses formes artistiques, peinture, théâtre, musique. La vie a fait que la musique devienne mon activité professionnelle, mais la peinture et le théâtre n’ont jamais été très éloignés de moi, et quand le moment fut venu, je me suis mis à la peinture.

On peut dire que cela a été une longue gestation, des rencontres aussi, avec des peintres du passé, des lectures. J'ai toujours été passionné par la vie des artistes, leur parcours, leurs questionnements, leurs croyances, ce que la vie leur avait fait découvrir, quel sens ils avaient donné à leur travail. Je me suis nourri de tout cela, à voir leur travail, et à les lire.

Je pense que quand un travail est sincère, et pas seulement le fruit d’une névrose, il est porteur pour celui qui le regarde. Je crois beaucoup à cela, à l’énergie d’un tableau, c’est une manière très subtile de sentir et de se sentir connecté à d’autres mondes. Pour moi, l’art est un véhicule du vivant, et j’aime me projeter dans des mondes qui ne sont pas miens mais qui peuvent avoir des rapprochements certains. Le plus touchant est de sentir dans les grands créateurs la foi qui les habite, ce besoin vital de créer, plus rien ne compte pour eux que cela. Et c’est une nourriture pour moi dont je ne me lasse pas.

Je crois beaucoup au processus de maturation, et je crois que mon désir de peindre est le fruit de ce processus. Il m'a fallu tout ce temps pour commencer à peindre. J’avais déjà commencé il y a une quinzaine d’années, ce fut une première initiation heureuse, sentir le pinceau sur la toile, son bruit, l’odeur des peintures, le touché des couleurs. Pour moi l’acte de peindre est, et doit être sensuel, comme l’est d'ailleurs mon rapport à la musique. Je vois en l’art la possibilité donnée à l’homme de s’ouvrir à ses sens.        .

Donc après une première période, j'ai laissé reposer pendant une dizaine d’années la peinture, jusqu’à que cela devienne pour moi une envie d’exprimer tout comme cela l’est en musique, et non un désir de me croire ou de me sentir peintre.

 
5. Comment s’est « construite » votre manière de peindre, y compris techniquement ? Comment se fait-il que vous peigniez de telle façon, avec tels matériaux ou couleurs, et pas tels autres ? Avez-vous tâtonné avant d’arriver à ce qui vu de l’extérieur semble être un « style abouti » ? Votre apparente maîtrise de vos moyens, techniques et expressifs, s’est-elle construite progressivement à partir du moment où vous vous êtes remis à la peinture il y a quelques années ?

Jean-Marc Léone :  J’ai toujours aimé le rapport physique avec la peinture, avec la matière. Pour moi c’est un besoin de ressentir le pastel ou la peinture sous mes doigts. J’aime établir avec eux un lien direct avec le papier ou la toile.

J'ai commencé par travailler le noir, le gris, le blanc, pour y chercher avant tout une profondeur, un espace qui permette au spectateur de se laisser plonger dans un inconnu. Le noir quand il est travaillé avec d’autres couleurs permet des possibilités infinies, que cela soit par le figuratif, l’abstrait, ou les deux conjugués. Je sens avant tout une grande liberté quand je peins, je me laisse aller à chercher, à essayer toute sorte de choses avec la peinture ou le pastel. Ce n’est pas un tâtonnement, mais plutôt un immense champ de découvertes. J’essaye toujours d’être surpris par tel ou telle recherche, et qu’elle soit toujours motivée par une envie de beauté, ou d’unité. En dehors de mes doigts, j’utilise bien sûr d'autres matériaux, pinceau, couteau, éponges, grattoir, coton, sel, sucre, eau, lait, huile. J’aime que cela soit ludique, d’ailleurs comme au théâtre j’aime jouer comme un enfant, eh bien dans la peinture, j’aime jouer à mélanger, à combiner différents éléments entre eux, ensuite je me laisse conduire.

Après une première exposition autour du noir, et de ses déclinaisons «  au gré des ondes », je me suis lancé avec passion dans la couleur, toujours en travaillant avec la même technique, j’ai ajouté aux pastels, de la peinture à l’huile, ce qui a donné au tableau une profondeur que j’avais dans les toiles plus sombres, mais que je n’arrivais pas à retrouver dans ce nouveau travail autour de la couleur. Après avoir obtenu ce que je cherchais avec ce nouveau  procédé, j'ai senti la nécessité d’y ajouter du relief, en travaillant le pastel comme de la glaise, pour donner au sujet, un contour et un relief plus vivant.

Oui, tout se construit progressivement. Mais sans une pensée, sans un travail sur ce que l’on veut voir, il ne pourrait pas y avoir grand-chose. Je crois que tout se prépare en amont, après des périodes intenses de travail, de création. Je laisse le tout se reposer, pour continuer à me nourrir. Des périodes qui peuvent durer plusieurs semaines ou mois, pour continuer à peindre par besoin, et non pas par nécessité, afin que le désir reste vif, et neuf. Sans ces périodes de gestation, où finalement tout se fait, il ne pourrait y avoir d’évolution. Elles sont nécessaires pour nous permettre d’aller encore plus loin dans la recherche de l’expressivité.
   

vendredi 27 septembre 2013

Roms : les 5 mensonges de Manuel Valls



Maurice Daubannay (1) nous communique ce cri du coeur.

(1) Maurice Daubannay est IA-IPR honoraire, ancien correspondant de la Défenseure des Enfants, administrateur de DEI-France, conciliateur (enfance) de la MDPH du Puy-de-Dôme.


***

Sur BFM-TV, mercredi 25 septembre 2013, ITV de Manuel Valls, ministre de l'intérieur. Sans journaliste compétent en face de lui (2), Valls ment, ment, ment et ment. Et n'est pas contredit. 

(2) Le journaliste en question était Patrick Cohen.


1. "J'ai mis fin à l'aide au retour". L'aide au retour systématique N'A JAMAIS EXISTE. 1er mensonge, pas de contradicteur.

Note. L’aide au retour proposée par l’OFII ne peut être accordée qu’une seule fois. A cet effet, il est procédé par l’OFII à la prise des empreintes digitales de tout demandeur d’une aide au retour et des membres de sa famille accompagnante âgés de douze ans et plus.
Chaque demande formulée auprès de l’OFII fait désormais l’objet d’une double vérification par le système de traitement automatisé OSCAR :
-  vérification des données à caractère personnel (nom, prénom, date de naissance, nationalité) du demandeur ou d’un membre de sa famille accompagnante ;
-  vérification des empreintes digitales (ou d’un membre de sa famille accompagnante âgé de 12 et plus).

2. Quand on "décampe", "les Roms repartent chez eux, en Roumanie". 2nd mensonge, ils tournent dans d'autres quartiers, d'autres rues pour squatter un autre terrain.

3. "On ne peut pas intégrer tous les Roms" (inintégrables par définition, modes de vie, etc.) ; 3ème mensonge. Quand les conditions offertes sont simplement correctes, comme pour toute personne vivant en France, les familles peuvent envoyer leurs enfants à l'école, les soigner, les faire jouer, etc. L'accompagnement associatif est remarquable. Les réussites (Deuil-la-Barre, 95 ; Wissous, 91 ; les villages d'insertion, etc.) ont été valorisées par la Délégation interministérielle à l'hébergement et à l'accès au logement (DIHAL, présidée par le "préfet des Roms" Alain Régnier) rattachée au ministère de l'Egalité des territoires et du logement. Et c'est précisément ces campements témoignant de belles réussites qui ont été démantelés systématiquement : cet été (Deuil-la-Barre, 95) et mardi 24 septembre (Wissous, 91) malgré l'intervention ferme et argumentée du Défenseur des droits, Dominique Baudis.

4. "les Roms doivent s'intégrer "chez eux" en Roumanie". 4ème mensonge ou torsion de la vérité. Les Roms sont ENCORE PLUS maltraités dans les pays de l'Est (ex-RDA, Hongrie, Roumanie, Bulgarie, Kosovo, Albanie, Serbie, etc.). Certains sont assassinés, brûlés vifs. Des "villages roms" se constituent à l'intérieur d'espace murés par les non-Roms. Plus d'école, plus de soins, plus d'activités, plus de magasins, etc.

5. "Seuls quelques Roms veulent travailler". 5ème mensonge ou distorsion de la réalité. Les Roms que Valls traite en sous européens n'ont pas le droit de travailler, s'ils sont roumains ou bulgares. Ce sera possible à partir du 1er janvier 2014. A ce moment toute l'Europe des 27 sera librement ouverte à tous, Roms et Tsiganes compris. C'est la loi européenne et républicaine. Point. Posons-nous, tous ensemble, les bonnes questions : comment peut-on faire pour que ça réussisse, que le "vivre ensemble", tellement prôné, devienne une réalité et que le ministre de l'intérieur arrête de démanteler les campements sans solution pérenne, conformément aux dispositions de la circulaire conjointe citée plus haut.

Maurice Daubannay 
ces propos n'engagent que moi.


lundi 20 mai 2013

Mon restaurant fétiche à Paris : l'Ober-Salé


Restaurant Ober-Salé
17 rue Oberkampf 75011 Paris (m
étro Oberkampf)
Tél : 01 43 38 46 68
Ouvert du mardi au vendredi, et le samedi soir.

Site internet / Facebook




Lorsqu'un(e) ami(e) me dit « j'ai découvert tel restau c'est délicieux tu vas voir » et que, pas convaincu, je l'y suis, c'est toujours la même chose. Finissant mes plats, je me dis : « on aurait mieux fait d'aller à l'Ober-Salé... »

Le point faible de l'Ober-Salé est sans doute son décor. Une amie rechigne un peu à y retourner car elle trouve le cadre tristounet. Moi je n'y fais pas vraiment attention, je suis surtout réceptif aux bonnes ondes qui circulent dans le restaurant.



Mise à jour février 2015 : la décoration a été refaite l'année dernière.


Le chef est un ange. Lorsque cet ancien chef de cuisine du Bristol passe dans la salle et salue discrètement les clients qui lèvent le nez de leur assiette, un courant de confiance et de sympathie s'établit aussitôt.

Stéphane Corcessin, chef et patron de l'Ober-Salé
  
Sa cuisine est empreinte de franchise et de probité. D'abord, ici, tout est frais. Aucun risque de se voir servir des plats industriels sous vide réchauffés, ma hantise au restaurant (1).

(1) Ceci depuis la vision de l'indispensable documentaire Restaurants : les pieds dans le plat. L'usage de plats industriels sous vide ou surgelés se multiplie dans les restaurants. Dernier traumatisme en date : un déjeuner un dimanche dans une grande brasserie de Montparnasse, pourtant fort honorablement connue. Au premier coup d'oeil j'y décelai de la "fausse cuisine" : cuisse de poulet à l'os coupé net et blanchi (chair par ailleurs "rassie"), steack tartare insipide et trop clair (le même exactement que dans tel café-brasserie des Halles) ; tout dénonçait une nourriture industrielle sous vide ré-accomodée en cuisine avant service. 


L'Ober-Salé est LA bonne adresse pour qui veut l'assurance d'une cuisine faite maison.

Comme il se doit dans ces conditions, la carte de l'Ober-Salé est courte (2).

Ober-Salé, menu déjeuner du 14 février 2013

(2) Une carte de type 8 entrées / 8 plats / 8 desserts a toutes les chances de s'appuyer, au moins en partie, sur un répertoire de plats industriels sous vide / surgelés.


Le soir, le menu-carte de l'Ober-Salé monte en gamme (3). Produits nobles, et une régalade qui elle aussi monte en catégorie : la différence de prix se justifie (pour entrée, plat et dessert : 31€ le soir, contre 18€ le midi).

Ober-Salé, menu dîner du 14 février 2013

(3) D'après ce que m'a dit la personne qui gère la salle, le "menu du soir" est depuis quelque temps proposé aussi au déjeuner.


Je vais parler ici du déjeuner du 14 février 2013 car j'y ai pris des photos.




1. Ravioles de queue de bœuf à la crème de moutarde (entrées)


Ravioles à la texture fine et fraîche, boeuf goûteux à l'intérieur, sauce à la crème légèrement citronnée (?) : un régal.

Pendant que je prenais des photos la personne en face n'avait pas attendu pour déguster son plat :


Comme toujours à l'Ober-Salé, le pain est très bon. Le régal continue donc lorsqu'il s'agit de saucer l'assiette.

Nous avons pris du Moulin-à-Vent au verre (7€), très bon et généreusement servi (15cl). Les vins au verre sont finement choisis à l'Ober-Salé. On peut citer aussi les Croze-Hermitage blanc et rouge, et le Menetou-Salon (blanc) depuis peu à la carte. Ce simple éventail de vins suffit pour trouver de remarquables accords avec la cuisine servie.


2. Saumon rôti, purée de panais et crème citronnée (plat)


Comme toujours à l'Ober-Salé, poisson cuit juste ce qu'il faut (texture onctueuse). Le saumon s'allie bien à la purée de panais légèrement sucrée. La sauce à la crème parachève un plat que l'on se fait un plaisir de déguster bouchée après bouchée.


2a. Pintade fermière rôtie à la crème et son étuvée de céleri rave (plat)


La personne en face était satisfaite de son plat. N'étant pas fan de céleri j'ai juste goûté la pintade qui était très bien, chair moelleuse et goûteuse.


3. Savarin et sa minestrone d'ananas, mangue et vanille bourbon (desserts)


Fraîcheur exemplaire pour ce dessert dominé par l'ananas et qui conclut agréablement le repas. Équilibre sucré / acidulé parfait (pas trop sucré, juste ce qu'il faut).


La cuisine de l'Ober-Salé se caractérise par un grand sens de l'harmonie, de l'équilibre, ceci jusque dans la portion servie pour chaque plat : ni trop peu, ni trop, simplement l'exacte mesure pour savourer le plat, en être justement rassasié, avant de passer au suivant.

Le chef prise la cuisine à la crème, les sauces à la crème (c'est aussi mon péché mignon) ; sans aucune lourdeur, c'est toujours réalisé en finesse.

La cuisine du chef Stéphane Corcessin est une cuisine d'auteur. Non parce qu'elle serait révolutionnaire en soi : mais parce que l'on sent derrière chaque plat, repas après repas, une même personnalité, avec ses mêmes qualités, s'exprimer (de même on peut sentir une même personnalité derrière les différents films de tel bon metteur en scène ; idem avec les livres etc.). Je n'ai pas en tête l'exemple d'un autre restaurant où l'on sentirait aussi nettement à l’œuvre, et de façon aussi convaincante, la personnalité de l'auteur.



Note. Contrairement à ce qu'indique l'addition, il s'agissait bien du 14 février :)
     

***
    
Pas de photos de dîners à l'Ober-Salé mais quelques souvenirs émus :

- Récemment, en entrée, une sorte de "nage" au haddock (ai oublié l'intitulé du plat : assiette servie avec un carré de nourriture sur lequel était ensuite versée de la crème liquide). Un pur délice, sublimé par l'accord avec le Menetou-Salon.

- Différents oeufs cocotte (entrée classique à l'Ober-Salé) : à la crème de langoustines ; à la crème de foie gras (4). Se dégustent dans le ravissement cuillère après cuillère.

- Lors du même récent dîner, des rognons à la crème (autre plat classique de l'Ober-Salé), cette fois accompagnés d'endives effilées : magnifique accord, et y compris avec le Menetou-Salon.

- Un soir, en dessert : un pain perdu au Cointreau sur lit de mandarines. Autant l'intitulé "pain perdu" n'était pas forcément engageant, autant le résultat fut marquant.




(4) Figurait au menu dîner du 14 février 2013, cf. photo plus haut.

lundi 11 février 2013

Le chef-d'oeuvre de Tod Browning

  
En dépit de l'OVNI Freaks (1932) et de toute l'estime que l'on peut porter à L'inconnu (1927), le chef-d’œuvre de Tod Browning pourrait bien être son Dracula (1931). Une étonnante atmosphère insufflée par la musique dès le générique va perdurer durant tout le film (excepté durant les dialogues : à l'aube du cinéma parlant, priorité est donnée à l'intelligibilité des paroles).

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vendredi 18 janvier 2013

Mankiewicz témoigne sur le maccarthysme (Avignon, 1981)


Un des chantiers de l'année 2012 : me débarrasser d'un maximum de vieilles cassettes VHS. J'en avais accumulé jusqu'à presque 400 (films diffusés à la télé, émissions diverses). Les premiers enregistrements remontent à 1987, année d'achat d'un magnétoscope par mes parents (dans les années 80, l'apparition du magnétoscope grand public, c'est-à-dire la possibilité d'enregistrer les programmes TV, avait fait révolution).

Ai retrouvé le témoignage suivant, inoubliable. Le réalisateur Joseph L. Mankiewicz raconte son bras de fer avec Cecil B. DeMille, en 1950, en pleine folie maccarthyste, lors d'une assemblée générale de la Directors Guild of America : réunion de 600 (six cent) réalisateurs américains. Les plus grands noms défilent. Delmer Daves fait une apparition émouvante, puis Fritz Lang, Rouben Mamoulian, John Ford... Moment particulièrement frappant : lorsque De Mille, après avoir entamé l'énonciation d'une liste de réalisateurs récalcitrants en prononçant leurs noms de façon antisémite, se fait huer par la salle (vers 18' sur la vidéo).


  
Sur la tranche de la cassette était noté : juillet 1980, Avignon. Après recherche sur le net il s'agirait plutôt de 1981 : extrait d'une émission Océaniques diffusée le 15 septembre 1987 sur FR3, avec Jean Douchet et Pierre-André Boutang à la manœuvre. L'enregistrement est hélas coupé (fin de la cassette...) au moment où, dans le récit, John Ford prend la parole.

Pas trace sur le net ni sur le site de l'INA de ce témoignage de Mankievicz : raison suffisante pour sauvegarder l'enregistrement et le mettre en ligne.